dimanche 28 septembre 2014

The Rolling Stones - Somegirls


THE ROLLING STONES - SOMEGIRLS (1978)
Pathé Marconi - Emi - 2C06861016 - (France)


Les Rolling Stones ne sont pas loin de toucher le fond à la fin des années 70. Après avoir vu leur rock’n roll se déliter jusqu’à le perdre sur Black and Blue, après avoir été sur le fil du rasoir des excès, c’est désormais une affaire judiciaire qui met leur existence en péril.Keith Richards a été arrêté à Toronto en février 1977 pour trafic d’héroïne et risque sept ans de prison, ce qui mettrait vraisemblablement un terme au groupe. En panne d’inspiration, en danger de mort, il va falloir quelque chose de fort pour sauver les Stones !

Et par miracle cela va arriver. Car 1977, c’est d’abord l’année des punks qui débarquent et poussent dans leurs retranchements les dinosaures, dont les Rolling Stones sont une espèce des plus évidentes. Mais une espèce fière, qui ne se laisse pas submerger facilement. Tout se passe comme si Jagger et les siens avaient de nouveau quelque chose à prouver face à ces jeunes impudents. Comme c’est de plus leur possible dernier album, autant se lâcher non ?

C’est ainsi qu’après avoir pris leur temps pour l’enregistrer, les Stones sortent Some Girls en juin 1978. Album qui allait devenir leur disque le plus vendu, tout en étant salué comme leur retour aux affaires. Il faut entendre Charlie Watts, tout content de rejouer enfin du rock qui déménage, se déchainer sur "When the whip comes down". C’est alors que l’on comprend ce que ce disque a en plus de ces prédécesseurs : on ressent tout du long le plaisir de ceux qui l’ont fait.

Un coup de frais qui doit beaucoup à Mick Jagger. Keith Richards empêtré dans ses problèmes, c’est le lippu qui impulse l’essentiel de la dynamique. Emballé par sa vie new-yorkaise (qu’il célèbre dans "Shaterred"), il donne une forte orientation américaine au disque, tant dans la musique que dans les paroles. Son chant est constamment habité, débarrassé d’une bonne partie de ses artifices. Jamais il n’aura été aussi à son aise qu’ici et jamais on n’aura eu autant envie de le suivre dans ses délires. Avec la cerise en prime : "Miss You".

Essentiellement écrite par ses soins, elle traduit dans la musique des Stones la mode d’alors : le disco. Alors que ce style parait encore plus déplacé par rapport à ce qu’il joue habituellement, le groupe est bien plus à l’aise que pour le funk de "Hot Stuff" ouvrant Black and Blue. Dernier grand tube en date du quintette, trait de génie pour certains et véritable trahison commerciale pour beaucoup, il convient de ne pas trop s’attarder sur ce titre car il ne représente en rien l’esprit général de l’album. Celui-ci est en effet forgé au rock comme on n’en n’a pratiquement plus entendu depuis Exile on Main Street. "When the whip comes down", "Lies", "Respectable" et "Shaterred" envoient un maximum tandis que "Some girls", "Far away eyes" ou "Before they make me run" jouent la bonne vieille carte du blues. Soient les vieilles marmites stoniennes en pleine ébullition.

Une marche vers l’essentiel symbolisée par le faible effectif recruté par les Glimmer Twins pour enregistrer le disque. Exit Billy Prestonnotamment, seul l’harmonica de Sugar Blue (un musicien rencontré dans le métro mais promis à une belle carrière) se taille une vraie place aux côtés des Stones qui n’en n’ont laissé que pour un saxophone, un orgue et quelques rares percus.

En limitant le nombre de musiciens (et donc d’influences), ils se recentrent sur la musique qu’ils savent le mieux jouer et laissent la plus grosse place aux guitares. Keith Richards n’étant pas au mieux, ce sont Mick Jagger et surtout Ron Wood qui viennent le suppléer. Le nouveau guitariste se retrouve en première ligne et s’en sort tout à fait honorablement en truffant l’album de parties de guitare-slide savoureuses. Il n’a certes pas l’inspiration d’un Mick Taylor mais n’en n’a nul besoin ici. Son jeu colle au contraire parfaitement avec cette volonté de recentrage.

Keith Richards n’est pas non plus totalement absent puisqu’en plus d’avoir participé à l’essentiel des sessions, il a composé deux titres. Le premier ("Before they make me run") fait le point sur ses problèmes d’alors, sur la lassitude qui l’assaille et son désir de changement. Le second est la ballade de l’album, "Beast of Burden". Un texte à nouveau introspectif mais surtout une musique laissant la place aux traits de guitare inspirés soutenant un Mick Jagger de haut niveau. Une réussite de plus fixée sur ce disque.

Si l’on met de côté Miss You, ainsi que quelques détails annonciateurs des années 80 (la basse trafiquée de "Shaterred", certains gimmicks de "Beast of Burden"), Some Girls est d’abord un grand disque de rock’n roll, issu certainement de la situation désespérante dans laquelle le groupe se trouvait. Quelques mois plus tard Richards ne fut condamné qu’à jouer un concert au profit d’une association d’aveugles. Les Stones furent par ailleurs comptés au rang des groupes plutôt épargnés par le punk.

Hors de danger, ils se complurent alors dans une situation confortable, devenant un groupe de grand-messe populaire. Après tout pourquoi pas, ils venaient bien de prouver qu’ils n’avaient plus rien à prouver. Ils pouvaient bien jouir tranquillement de leur statut de groupe majeur. Mais on attend toujours le digne successeur de Some Girls dans la liste des grands albums des Rolling Stones. (Destination Rock).




TRACKLIST:

A1       Miss You
A2       When The Whip Comes Down
A3       Just My Imagination (Runing Away With Me)
A4       Some Girls
A5       Lies

B1       Far Away Eyes
B2       Respectable
B3       Before They Make Me Run
B4       Beast Of Burden
B5       Shattered









Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire